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Photoreporter en baie de Saint Brieuc

L’eau du Nil, partage ou guerre / Franck VOGEL

C’est un festival original que l’on peut visiter en ce moment en Bretagne. Toutes les expositions de « Photoreporter en baie de Saint Brieuc » sont inédites. Et c’est la manifestation qui a financé les reportages.

On découvre ainsi, en accès gratuit, des images réalisées par des pointures du métier : Jim BRANDENBURG ,Claudine DOURY,Gwen DUBOURTHOUMIEU ,Cédric GERBEHAYE ,Antoine GYORI ,Gary KNIGHT,Olivier JOBARD ,Pierre-Yves MARZIN ,Sonia NAUDY ,Zeng NIAN ,Pierre TERDJMAN ,Tomas VAN HOUTRYVE , Ami VITALE, Franck VOGEL, Gaël TURINE.

Ceci alors que la plupart des festivals en France, innombrables, se contentent souvent d’expositions clé en mains et à moindre coût. Mais le festival est notable à un autre titre : ce sont des entreprises qui ont financé la majeure partie de l’événement – presque les deux tiers du budget global, le reste venant de subventions (communauté d’agglomération, Région, Département).

Il est plutôt rare de voir ainsi associés photojournalisme et secteur privé. L’idée est venue d’Alexandre Solacolu, directeur du festival, juriste maritimiste qui a beaucoup oeuvré dans le sponsoring des courses de voile. « On sait que la presse et le photojournalisme sont en crise. L’idée, c’était de donner le moyen aux photographes d’aller sur le terrain », dit-il. Il a a imaginé de créer un festival, avec un fonds de dotation destiné à financer la production de photoreporters, et soutenu par des entreprises. Ce sont surtout des PME de la région qui ont répondu présentes, depuis le Crédit agricole des Côtes d’Armor, jusqu’à Pratibuche (récupération des chutes de bois) en passant par Lucie (herbes aromatiques), offrant de 1000 à 30000 euros chacune – un exploit en ces temps de crise. D’autant que la direction a pris soin de protéger la ligne éditoriale : aucune entreprise n’a pu influer sur le choix des sujets. « l’idée n’était pas de faire des commandes d’entreprise! sourit le directeur. On a d’abord réuni 150 000 euros pour financer la production des sujets, puis choisi les projets, et ensuite on les a présentés aux partenaires ».Un appel à projet a permis de réunir 300 dossiers de candidature, dont quinze ont été sélectionnés par un jury issu du monde du photojournalisme, dont les directeurs photo de plusieurs magazines, et présidé par le directeur du festival de photojournalisme de Perpignan Jean-François Leroy. Puis les reporters sont partis sur le terrain, sans pour autant être lachés dans la nature: « Maintenant qu’il y a moins de commandes, les photojournalistes ont perdu des financements, mais aussi l’accompagnement éditorial qu’assurait la presse, explique le directeur. Les photographes se débrouillent seuls, et la qualité s’en ressent. On a voulu rétablir cet accompagnement. » Didier Rapaud, ancien de Paris Match, est donc devenu directeur artistique du festival, jouant le rôle de rédac-chef photo pour les reporters.

Les images qui résultent de cette formule originale et gagnante sont à découvrir dans différents lieux de la ville de Saint Brieuc jusqu’au 11 novembre. Pour le public, c’est l’occasion de découvrir des images inédites et de discuter avec les photographes. Pour les reporters, c’est l’assurance de pouvoir financer un reportage, et ensuite la possibilité de le vendre dans la presse: « les photographes restent propriétaires de leurs images, explique Alexandre Solacolu. Après le festival, c’est le modèle économique traditionnel qui reprend ses droits ». Et pour les entreprises? Elles peuvent espérer des retombées en terme d’image, plus largement « un dynamisme, une ouverture sur le monde » explique le dynamique directeur qui a mené un long travail de sensibilisation autour de la notion d’engagement. « Idéalement, j’aimerais transformer ces chefs d’entreprise en collectionneurs » dit-il. Même s’il s’agit pour l’instant, plus modestement, de pérenniser la formule. Avec déjà 55000 visiteurs, il y a de quoi être optimiste.

Festival : http://www.festival-photoreporter.fr/?page_id=6&

Elections Américaine :Les photos officielles de la Maison Blanche vues par des photographes français.

A lire sur Slate.fr : Des photojournalistes français commentent les clichés de Pete Souza, le photographe officiel d’Obama.

Barack Obama au sommet du G20 à Cannes en 2011
© Sebastien LAPEYRERE / Olynea Photos

Depuis l’investiture de Barack Obama en janvier 2008, Pete Souza, le photographe officiel de la Maison Blanche, prend des milliers de clichés lors des déplacements, des réunions de travail et des événements de la vie quotidienne à la Maison Blanche. Depuis février 2009, il publie une partie de ses photos en accès libre sur le profil Flickr de la White House. Ancien photographe officiel de Reagan à la Maison Blanche, il a aussi travaillé comme photojournaliste pour le magazine National Geographic, le Chicago Tribune et Life Magazine.  Slate.fr aurait souhaité obtenir l’avis du photographe officiel de l’Elysée sur les clichés de Pete Souza. Stéphane Ruet, responsable du service photographique à la Présidence de la République Française, depuis l’élection de François Hollande, a malheureusement refusé de participer à ce projet. Nous avons donc choisi de demander à cinq photojournalistes français, Guillaume Binet, Sébastien Calvet, Yann Rabanier, Olivier Roller et Laurent Troude, tous spécialistes de la politique et du pouvoir, ce que leur inspirent les images de Pete Souza. Rapide présentation des cinq photographes: Guillaume Binet, photographe de l’agence MYOP, a fait plusieurs reportages pendant la campagne présidentielle 2012. Sébastien Calvet, photographe d’actualité politique, sociale et économique à Libération, a suivi la campagne présidentielle de Ségolène Royal en 2007 et celle de François Hollande en 2012. Il tient un blog où il analyse ses photos sur Libération.fr. Yann Rabanier, photographe indépendant. Il a notamment réalisé des portraits des candidats aux primaires socialistes pour le journal Libération. Olivier Roller a réalisé des portraits de nombreux hommes et femmes politiques français. Laurent Troude, photographe à Libération, il a suivi la campagne de Jacques Chirac en 2002, de Nicolas Sarkozy en 2007 et en 2012 Suite sur Slate.fr

Voir les photos commentées par les photojournalistes français : http://www.slate.fr/grand-format/photo-souza-64429

World Press Photo 2012

Samuel Aranda lauréat du 55 éme World Press Photo.

Le photographe espagnol Samuel Aranda a pris cette photo le 15 Octobre 2011 au Yemen, dans une mosquée de Sanaa, la capitale, transformée en hôpital. L’homme faisait partie de manifestants, protestant contre le régime du président Ali Abdullah Saleh. Samuel Aranda, membre de l’agence Corbis Images, était envoyé par le New York Times. Koji Aoki, photographe et responsable de l’agence Aflo Sport, faisait partie du jury de la cinquante-cinquième édition du World Press. Il explique les raisons de ce choix : « Cette photo parle pour l’ensemble de la région. Elle symbolise tout ce qui se passe au Yemen, en Égypte, en Tunisie, en Libye ou en Syrie. Elle est emblématique du printemps arabe. Mais elle montre un moment intime, à l’écart des événements. Et elle montre le rôle important joué par les femmes, qui ne se contentent pas de soigner les blessés. Elles sont pleinement actives. »

Samuel Aranda est né en 1979 à Barcelone, Samuel Aranda a travaillé pour El Pais et El periodico de Catalunya avant de rejoindre, en 2004, l’Agence France Presse. Il a photographié de nombreux conflits et soulèvements en Espagne, au Pakistan, à Gaza, au Liban, en Iraq, en Palestine ou au Maroc.     www.samuelaranda.net

Pour visualisez les photographies et les reportages lauréats dans les neufs catégories .

http://www.worldpressphoto.org/gallery/2012-world-press-photo

 

1 er Prix General News Stories  Battle for Lybia de Rémi Ochlik

Battle for Libya Remi Ochlik :  www.ochlik.com

1 er Prix Sport Single :  Donald Miralle, Jr.

Rassemblés à l’occasion du championnat mondial Ford Ironman de Kona (Hawaï)  lors d’ une des courses les plus dures au monde – les triathlètes ont nagé au dessus d’un banc de poissons et de l’objectif de Donal Miralle, dans la baie de Kailua.
 Ford Ironman World Championship (Photo : Donald Miralle Jr.) www.donaldmiralle.com

1 er Prix Spot News Single :  On Revolution Road de Yuri Kozyrev

 11 Mars 2011
Les rebelles de Ras Lanuf, en Libye. Pendant des semaines, les rebelles ont combatut contre le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi avec l’espoir que le monde viendrait à leur secours.

Yuri Kozyrev : Noor Images

1 er Prix Nature Stories  : Rhino Wars de Brent Stirton

25 mars 2011

Une  équipe de quatre hommes anti-braconnage, gardent en permanence un rhinocéros blanc du Nord dans le parc conservatoire de la Pejeta Ol au Kenya.  Le district de Laikipia, au Kenya et le plus grand sanctuaire pour les rhinocéros noirs en Afrique de l’Est. Il est également le foyer de quatre des huit autres rhinocéros blancs du Nord, animal le plus menacé du monde. La corne de rhinocéros vaut maintenant plus que l’or sur le marché international. Seule Afrique du Sud a perdu plus de 400 rhinocéros à des incidents de braconnage illégal en 2011. La demande de corne de rhinocéros est alimentée par une classe moyenne et supérieure riche d’Asie et utilisé massivement comme médicament.

 Brent Stirton  www.brentstirton.com

Le prix à payer pour être un photojournaliste

Révolution Egyptienne - Février 2011 © Sebastien LAPEYRERE / Olynea Photos

Financé son reportage devient de plus en plus difficile pour les photojournalistes confrontés à la baisse des prix et des commandes auprès de la presse . Et partir en reportage ,avec le  risque de ne pouvoir rentrer dans ces frais.

Un excellent article sur le métier de photojournaliste et sur le financement des reportages .

Jonathan Alpeyrie est un photojournaliste, en cette fin d’année, il ne nous parle de ses images, mais de son bilan financier: étonnant et plein de leçons et d’enseignements.

La plupart des membres de la profession se plaignent de l’état de la presse aujourd’hui dans un monde qui change en permanence. Je ne déroge pas à ce constat. La presse connaît une transformation sans précédent, comme les médias sociaux, et les nouvelles technologies transforment radicalement le cadre auquel s’étaient habitués les journalistes et photographes.

Ce n’est pas le fait d’être publié qui pose problème. Gagner suffisamment d’argent pour vivre, payer ses frais au quotidien, et financer les projets à venir, c’est cela, le vrai problème. Les journaux et magazines qui peuvent se permettre d’envoyer des journalistes au loin pour couvrir des événements majeurs sont de moins en moins nombreux, et les journalistes en question doivent trouver de nouveaux moyens de faire de l’argent. Les agences photo, par exemple, ces dernières années, ont fait appel de plus en plus souvent à des photographes locaux, parce que cela leur coûte bien moins cher que de payer leurs propres équipes et de les envoyer dans des pays lointains.

De façon plus déterminante encore, la côte des photographies s’est effondrée ces vingt dernières années avec l’arrivée en force d’internet, qui met naturellement l’accent sur la quantité plutôt que sur la qualité. Polaris Images, l’agence qui me représente  internationalement, me fait publier tous les jours dans le monde entier, ce qui est très appréciable, bien sûr, mais quand je reçois mon solde, la somme accumulée est plutôt dérisoire, au regard du nombre de photos vendues et de la quantité de risques que j’ai dû prendre au cours de certains de ces voyages. Par exemple, la Chine est un marché important pour moi, avec peut-être 10% de mes ventes totales par mois. Les Chinois ont dévalué le prix des photographies autant qu’ils ont pu, achetant un cliché en moyenne 30 dollars pièce : c’est un prix très bas, qui ne prend absolument pas en compte la qualité de la photo ou les risques pris pour la réaliser.

Mais finalement, le point peut-être le plus essentiel tient au comportement de la presse envers elle-même, et à son incapacité à se réinterroger : à mon avis, c’est le danger le plus important auquel elle est confronté. Depuis quelques décennies maintenant, le monde de la presse a dû faire face à des revenus et des abonnements en baisse constante pour ses journaux, ses magazines… Il est certain, cependant, que l’avènement d’internet a beaucoup à voir avec cet état de fait, les gens préfèrent chercher leurs informations sur une grande variété de sites offrant du contenu gratuit, plutôt que de payer pour des titres papier. Une situation contre laquelle il est difficile de lutter, il est vrai. La presse a rapidement trouvé une solution simple pour augmenter ses revenus : créer et vendre du contenu que les gens ont envie de lire ou de voir. Le résultat de cette stratégie s’est rapidement fait sentir : la qualité des titres de presse a rapidement décliné, jusqu’au point où certains magazines, qui étaient auparavant reconnus pour leur qualité, sont devenus des mélanges difformes d’informations et de ragots sur les célébrités. Life magazine et Paris Match sont les exemples parfaits de cet état de fait.

Cela fait maintenant dix ans que j’exerce le métier de photojournaliste, et ma pratique colle en tout point à la réalité exposée dans les paragraphes précédents. Comme il est facile de critiquer la nature même de ce qu’est devenue la presse occidentale, je vais prendre des exemples concrets issus de mon expérience, qui correspond cependant à la situation et à l’état d’esprit de tous les professionnels qui, comme moi, luttent pour réussir à vivre de leur métier.

Pour illustrer cette nouvelle réalité, je vais donner quatre exemples de voyages que j’ai réalisé pour couvrir des événements internationaux : la guerre de la drogue au Mexique, la guerre en Libye, le scandale Dominique Strauss-Kahn, et l’indépendance du Sud Soudan. Chacun va me permettre d’illustrer une fortune différente du processus de production, et de donner une idée de l’argent dépensé pendant ces déplacements et du retour financier que j’ai pu réaliser.

La guerre de la drogue au Mexique est devenue depuis 2006 un événement international, couvert de temps à autre par la presse mondiale. À mon sens insuffisamment, alors que ce conflit s’est transformé en vraie guerre civile, avec des implications internationales majeures. En mars 2011, j’ai décidé de couvrir cette guerre muette à la frontière entre le Mexique et l’Arizona, dans le village frontalier de Nogales. Pendant trois semaines, j’ai travaillé avec les forces de police spéciale anti-drogue américaines (Metro) qui combattent les cartels de la drogue. J’ai traversé la frontière une demi-douzaine de fois vers le Mexique pour essayer de retraduire la perspective mexicaine sur ce drame. J’ai dû me rapprocher dangereusement d’un de ces cartels pour photographier la vie quotidienne sur place, et les membres de ces organisations criminelles. Je me suis senti plus inquiet et paranoïaque à ces occasions que lors de n’importe quelle guerre que j’ai pu couvrir par ailleurs. Quand mon reportage a été terminé trois semaines plus tard, j’ai dû mettre fin à mon séjour précipitamment : j’avais l’impression d’être suivi, la police US m’a confirmé que c’était le cas, alors je suis parti. Le niveau de risque consenti pour réaliser ce reportage n’a jamais été pris en compte financièrement. Toutes mes dépenses pour un séjour de trois semaines ont atteint 2500 dollars. Polaris et moi-même n’avons pas réussi à vendre cette histoire à sa vraie valeur. Je pense que j’ai à peine fait 1000 dollars en retour, perdant ainsi 1500 dollars sur ce voyage. Ce n’était pas la question bien sûr, puisque j’avais des conditions de travail particulièrement propices. Mais en termes financiers, ce voyage a été un échec.

La guerre en Libye est devenue très rapidement un événement international de première grandeur, et a été couverte par tous ceux qui voulaient s’y faire un nom. Pour moi, c’était une guerre …;

….Suite 

Jonathan Alpeyrie sur le site La lettre de la photographie